jeudi 28 juin 2007

Khadija Darid, magazine «Arabiyat» : une Arabe au Canada

«Arabiyat». Ce titre aux intonations musicales nous vient du Canada. Khadija Darid, une Marocaine installée depuis une vingtaine d’année au pays de l’érable et du Castor a décidé de tenter l’aventure de lancer un magazine bilingue. «Arabiyat» a donc vu le jour. Une entreprise originale. Car, cette femme que rien ne prédisposait à investir une carrière journalistique, s’est lancée un véritable défi. Celui de créer des liens entre une communauté d’origine arabe, numériquement très forte au Canada, mais très divisée, disparate. L’objectif était aussi de rectifier l’image que les canadiens commençaient à avoir, les médias aidant, des Arabes et des musulmans.

Le 11 septembre, qui ébranla les Etats-Unies voisins, agira comme un détonateur. Il fallait supporter le regard de l’autre, chargé d’interrogation, de suspicion, voire de crainte et de rejet. «Il faut savoir que les Canadiens sont des pacifistes. Ils ont du mal à comprendre que l’on puisse être violent», tente de justifier cette femme qui s’est complètement intégrée à la société canadienne. Etudiante en littérature en France, elle s’embarque un jour en compagnie de son mari pour Montréal. Ce qui devait être un simple voyage d’agrément s’est transformé en projet d’installation définitive. «Il faut dire que nos vacances se déroulaient au printemps. Nous n’avions alors aucune idée de l’hiver canadien», dit-elle avec un léger accent québécois. «Le froid devient supportable lorsqu’on découvre une société fondée sur des valeurs réelles de paix et de tolérance. Ce sont ces valeurs que je veux inculquer à mes enfants». Khadija Darid est sous le charme de ce pays qui l’a accepté avec ces différences et lui a offert les chances de son intégration au même titre que des milliers de citoyens venus d’ailleurs. Au bout de quelques années elle devient directrice d’un centre de réadaptation pour handicapés rattaché à un des plus grands centres hospitalier du Québec. Comme elle, des étrangers ont pu accéder à des fonctions importantes, y compris dans les hautes fonctions de l’administration et au sein des institutions représentatives.


Les Marocains font aujourd’hui partie d’une communauté qui a bien réussi au Canada. «C’est la communauté étrangère qui vient au premier plan en terme de niveau d’instruction élevé de ses membres. Les juifs viennent en seconde position», souligne-t-elle. Cet atout n’est pas suffisamment exploité à ses yeux. Khadija Darid se dit choquée lorsque les membres de la communauté juive s’opposent à la réception, via le réseau national de télévision, de la chaîne Al Jazeera et obtiennent gain de cause. Non qu’elle soit grande fan de la chaîne satellitaire, mais elle est subjuguée par la démarche d’une communauté qui reste vigilante et défend ses intérêts dans la solidarité totale. «Ce qui m’a le plus choqué c’est que les Arabes donnaient l’impression de ne pas être au courant». Son défi, à travers le lancement d’Arabiyat, était donc d’essayer de les rassembler ou du moins de créer des liens de communication entre eux. «Arabiyat» s’adresse en premier lieu aux femmes. La cible est délibérément choisie. Son idée était de sortir les femmes arabes de l’exclusion et de leur donner de la visibilité dans la société canadienne avec l’espoir de les voir agir plus efficacement que les hommes sur leur environnement. Elle est aujourd’hui la première surprise par le succès de son entreprise. Sa revue est très sollicitée par ses concitoyennes arabes qui tiennent à s’offrir un passage sur ses colonnes. Une source d’enrichissement permanent pour cette éternelle insatisfaite. “Je ne fais pas une revue à la hauteur de mes ambitions, mais plutôt à la hauteur de mes moyens ”. Khadija Darid apprend à connaître les autres femmes venues d’Algérie, d’Irak, de Liban, d’Egypte et d’ailleurs. «Nous avons en commun une langue, parfois une religion, mais nous avons chacune notre spécificité», précise-t-elle. Une belle diversité qu’elle tient à présenter à un lectorat composé pour le tiers de Canadiens francophones. Des projets pour son magazine, elle en a plein la tête, comme celui de le faire diffuser au Maroc.


Ce produit visiblement prisé, offre des sujets variés. Dossiers de société, de cultures, de mode et d’art culinaire meublent les pages de ce magazine imprimé en papier glacé. L’actualité marocaine sur la Moudawana fait la couv. du magazine. L’avancée du code donne des motifs de fierté à cette femme qui déclare la main sur le cœur : “ j’ai une partie de moi qui est restée ici au Maroc”. Regardant sa vie dans le rétroviseur, elle ose cette réflexion, un brin philosophique : «Parfois je me demande ce que j’aurai été si j’avais passé toute ma vie auprès de ma famille, dans mon pays. Je sais que je n’aurai pas été ce que je suis aujourd’hui, mais aurai-je été pire ou meilleure ? Je ne le saurai jamais. Ce que je crois surtout c’est que l’on doit être drôlement bien lorsqu’on est en harmonie avec son entourage et avec les valeurs qui nous entourent».


Le Matin

lundi 25 juin 2007

Un guichet unique pour mieux intégrer les immigrants qualifiés?

Le gouvernement fédéral compte accueillir en 2007 entre 250 000 et 265 000 nouveaux résidents permanents. Le relèvement du niveau d'immigration est principalement lié aux pénuries de main-d'oeuvre prévues dans le contexte du vieillissement de la population.

Des recherches menées récemment montrent toutefois que les immigrants font face à des obstacles importants lorsqu'ils cherchent un emploi correspondant à leur expérience et à leur formation.

«Trop de cuisiniers gâtent la sauce», on pourrait résumer ainsi le problème. La multiplicité des intervenants cherchant à améliorer les perspectives d'emploi des immigrants qualifiés a pour effet de compliquer l'élaboration et la mise en place de politiques appropriées. De même, la discontinuité des champs de responsabilité et d'imputabilité entre les ministères fédéraux et provinciaux suscite des difficultés de coordination à tous les paliers de juridiction. Bref, la confusion règne.

Cloisonnement entre ministères

Un autre aspect du problème est relié aux «silos de politiques» créés par le cloisonnement des responsabilités entre le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration (CIC) et celui des Ressources humaines et du Développement social (RHDSC). Le premier se charge de la sélection et de l'installation des immigrants sans toutefois s'occuper explicitement de leur intégration au marché du travail, tandis que le second administre les programmes portant sur le marché du travail en général, mais n'en a aucun qui vise spécifiquement les immigrants. C'est ainsi qu'aucun ministère n'est mandaté pour s'occuper de leur insertion économique et que cette tâche importante n'a aucun responsable attitré.

Il ne sera pas facile de mettre de l'ordre dans cette situation. Bien qu'aucune solution ne s'impose encore à l'heure actuelle, on constate néanmoins une volonté politique de résoudre le problème. Les deux derniers budgets fédéraux ont annoncé des investissements visant expressément à favoriser l'insertion des immigrants qualifiés au marché du travail. La proposition, faite tout dernièrement, de créer un Bureau de reconnaissance des titres de compétences étrangers, doté d'un budget de 13 millions de dollars sur deux ans, vient s'ajouter à un ensemble déjà confus d'instruments de politique, de mécanismes de financement et de complexités juridictionnelles. Sera-t-il l'outil capable d'aider à clarifier la situation et d'accroître la cohérence entre les mesures en place, ou ne contribuera-t-il au contraire qu'à embrouiller davantage la donne?

Des mesures pour améliorer l'intégration des immigrants

Dans une étude publiée par l'Institut de recherche en politique publique, nous proposons diverses mesures et orientations qui aideraient à améliorer la situation des immigrants qualifiés sur le marché du travail.

D'abord et avant tout, il faut préciser et clarifier le rôle du gouvernement fédéral en ce qui concerne l'emploi des immigrants. Il est l'acteur crucial capable de dissiper la confusion et doit donc jouer un rôle de bailleur de fonds, de coordonnateur et de facilitateur. Ottawa doit participer de façon intégrale aux efforts en vue d'améliorer les services d'évaluation et de formation linguistiques, la sensibilisation des employeurs, l'encadrement, la formation de transition, les prêts étudiants et les programmes de stage rémunérés.

Ensuite, il faudra renforcer les ententes fédérales-provinciales afin de répondre plus efficacement aux besoins des immigrants liés au marché du travail. Il faut en outre reconnaître le rôle que jouent les municipalités et augmenter les capacités et les ressources qu'elles consacrent à la planification et à la prestation des services.

Un guichet unique

Tout aussi importante sera la tâche de clarifier et renforcer le mandat du nouveau Bureau de reconnaissance des titres de compétences étrangers.

En termes plus précis, le Bureau devrait encourager la création de réseaux entre les employeurs et les candidats à l'immigration pendant qu'ils sont encore à l'étranger. Il devrait également mettre en place un service de référence sous forme de guichet unique, ce qui nécessitera que le gouvernement fédéral collabore étroitement avec les provinces et avec les autres parties intéressées à la création d'un centre national de collecte d'informations sur les exigences professionnelles de différents secteurs d'occupation, les programmes et les services.

Enfin, le nouveau Bureau devrait mettre au point des outils pour faciliter la reconnaissance des titres de compétences et des qualifications. Pour cela, il faudra favoriser une participation plus efficace des instances qui ont des responsabilités directes dans ce domaine, depuis les fournisseurs de services d'évaluation et les organismes de réglementation des professions jusqu'aux établissements d'enseignement postsecondaire et aux employeurs.

L'immigration a puissamment contribué à l'enrichissement de la société canadienne dans le passé. Pour que le Canada puisse continuer, aujourd'hui et dans le futur, à profiter des immenses bienfaits qu'elle procure, il faudra que le gouvernement fédéral modifie l'architecture des politiques et des programmes en collaboration avec les provinces, les municipalités, les employeurs et les autres grands acteurs sociaux.


Par Naomi Alboim et Elizabeth McIsaac

dimanche 24 juin 2007

Immigration au Canada : Le Maroc détrône l’Algérie

L’immigration au Canada séduit plus de candidats du Maroc que d’Algérie, d’après les statistiques compilées par l’ambassade du Canada en France pour la période 1998-2004.


Première constatation, au Maghreb, le Maroc est le premier pourvoyeur de migrants pour le pays de l’érable. Selon les chiffres disponibles, 17.517 Marocains ont obtenu un visa de résident permanent au Canada durant la période concernée. Et ce chiffre est vraisemblablement révisable à la hausse dans la mesure où, depuis le 1er janvier 2004, c’est l’ambassade du Canada au Maroc qui traite les demandes de citoyens marocains ou de requérants résidant au Maroc. Les chiffres fournis par l’ambassade du Canada en France pour 2004 - et concernant le Royaume chérifien - sont donc incomplets.

Après le Maroc, c’est l’Algérie qui est le second réservoir de migrants avec 15.840 visas de résidents permanents octroyés de 1998 à 2004. Suivent ensuite la Tunisie (2.633 résidents permanents) et la Libye (1.520). Ces chiffres confirment ainsi que l’immigration maghrébine au Canada est essentiellement une affaire algéro-marocaine.

Par ailleurs, ces flux humains peuvent être divisés en quatre grandes catégories. Pour les quatre pays concernés, celle des « travailleurs qualifiés » arrive largement en tête : 12.939 pour l’Algérie, 13.911 pour le Maroc, 1.943 pour la Tunisie et 1.281 pour la Libye. Vient ensuite celle des regroupements familiaux où, le plus souvent, un résident permanent déjà installé fait venir les siens au Canada. De 1998 à 2004, on dénombre dans cette catégorie 2.094 Algériens, 2.599 Marocains, 598 Tunisiens et 139 Libyens.

L’analyse de ces chiffres nécessite d’autres éléments mais elle permet de dégager une piste de réflexion : on peut supposer ainsi qu’une partie de l’immigration maghrébine à destination du Canada est le fait d’individus isolés (célibataires ou non) qui une fois installés pensent à faire venir leur famille, voire à la fonder dans le pays d’origine.

Synthèse de Kahina
D’après le Quotidien d’Oran

Deux candidats malheureux à l'immigration poursuivent le gouvernement : Le Québec, un état raciste

Le dossier d'un immigrant du Maghreb est traité en 72 mois tandis que celui d'un Français l'est en quatre mois à peine.

Deux Marocains, dont la demande d'immigrer au Québec a été refusée en août et septembre 2002, accusent les autorités politiques québécoises de faire preuve de racisme en allouant moins de ressources à l'étude des dossiers en provenance du Maghreb qu'à ceux provenant notamment de la France et de la Roumanie. Ils estiment que le délai encouru leur a été fatal.

Cette pratique supposée aurait fait en sorte qu'au moment où les demandes de Khadja Goumbarak et Mohamed Tayouri ont été étudiées, leur qualification professionnelle n'apparaissait plus sur la liste prioritaire du ministère. Ils estiment que s'ils avaient été Français ou Roumains, avec les mêmes qualifications, leur demande d'immigration aurait été étudiée avec célérité et aurait eu des chances d'être agréée.

Pour étayer cette thèse, l'avocate des deux Marocains a demandé hier à la Cour supérieure de l'autoriser à consulter des documents ministériels et du Conseil exécutif de l'automne 2002, où il est question des orientations québécoises en matière d'immigration.


Les documents visés ont servi de base à des discussions au conseil des ministres et certains ont été signés par Rémy Trudel et André Boulerice, qui étaient alors respectivement ministre et ministre délégué des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


Même si la représentante du procureur général du Québec s'est opposée, pour des questions de sécurité et confidentialité, à cette demande de documents parce qu'ils font partie du processus décisionnel du gouvernement, le juge Jean Frappier a autorisé l'avocate des deux Marocains à parcourir les documents en question pour mieux préparer sa cause.


Selon un document émanant du ministère, en 2003, les délais moyens de traitement des demandes provenant du Maghreb (Maroc, Algérie et Tunisie) sont de 60 à 72 mois, comparativement à trois à quatre mois pour ceux de Paris.


L'avocate des deux Marocains, Sophie Patricia Guerrero, attribue cette différence dans la rapidité de traitement des dossiers aux budgets octroyés pour le faire.


«Pour une immigration de candidats francophones d'Afrique de l'Ouest ou du Maghreb, les objectifs sont réduits au maximum afin que le moins de candidats possible soient acceptés. Pour une immigration blanche, les budgets octroyés sont considérables et permettent aux candidats de ne subir aucune attente et d'être acceptés avec entrevue en trois à quatre mois, et ce, par milliers», fait-elle valoir.


Me Guerrero considère que c'est un cas de deux poids, deux mesures et que la seule différence entre un Roumain, un Français et un Africain, puisqu'ils sont soumis à la même grille de sélection, est leur origine ethnique. D'où sa conviction qu'il y a discrimination raciale.


Si le procureur général du Québec ne va pas en appel, cette cause devrait être entendue sur le fond en avril à la Cour supérieure.


Source : Rolland Parent
Presse Canadienne

19 000 Maghrébins attendent pendant que l'État encaisse des millions de dollars

Les candidats pourraient devoir patienter de cinq à sept ans

Quand le Québec reçoit une demande d'immigration du Maghreb, il encaisse le chèque et dépose le formulaire à traiter sous les 19 000 qui attendent. Résultat : au moins 5,7 millions $ pour l'État et des délais de cinq à sept ans pour les candidats du Maroc, d'Algérie et de Tunisie.


Chaque fois qu'un étranger entame une démarche pour venir au Québec, il doit accompagner sa demande d'un chèque de 300 $ pour lui, plus 100 $ pour chaque membre de sa famille immédiate l'accompagnant. Pierre Brunet, président de l'Association québécoise des avocats en droit de l'immigration, calcule que chaque candidature coûte en moyenne entre 500 $ ou 600 $.


Selon les données transmises par le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration (MRCI), 19 000 dossiers attendent d'être traités. Une quantité équivalente de chèques de 300 $ se traduirait par une contribution de 5,7 millions $. Si les chèques sont en moyenne de 500 $, ce sont presque 10 millions $ qui ont été encaissés.


Selon M. Brunet, le fossé est tel entre le nombre de demandes reçues et celles qui sont traitées que 10 000 formulaires de plus devraient être déposés sur la pile cette année. Ce qui représente au moins 3 millions $ de plus pour l'État québécois.


Depuis 2001, le nombre de demandes d'immigration en provenance du Maghreb a explosé et les délais de traitement n'ont cessé de s'étirer. Les Maghrébins qui adressent aujourd'hui une demande au MRCI pour venir au Québec reçoivent comme accusé de réception une lettre les avisant que leur "dossier est en attente de traitement. (...) Le délai entre la réception d'une demande de Certificat de sélection est présentement de l'ordre de cinq ans pour les demandes en provenance du Maroc et de sept ans pour celles de l'Algérie et de la Tunisie".


Avant de remercier les demandeurs de leur "intérêt pour le Québec", le Service d'immigration les avise que, "compte tenu du volume important de demandes qui nous sont soumises, nous ne répondrons pas aux demandes concernant l'état ou le statut du dossier".


Le gouvernement du Québec explique l'augmentation des délais de traitement par cette explosion soudaine de la demande, qu'on attribue principalement aux démarches particulièrement actives des consultants en immigration.


Quant à la durée du délai, Claude Fradette, conseiller en communication au MRCI, précise "le cinq à sept ans, ça n'existe pas. C'est du virtuel pour l'instant. Personne n'a encore attendu ça", mais convient que ceux qui envoient leur demande maintenant, "vont attendre cinq ou sept ans si aucune mesure n'est prise". À l'heure actuelle, ceux qui reçoivent leur Certificat de sélection du Québec (CSQ) ont attendu en moyenne deux ans.


En 2003, les fonctionnaires du MRCI ont reçu 7882 demandes en provenance du Maroc, de l'Algérie et de la Tunisie et en ont traité 3911. Durant cette période, 4513 demandes sont parvenues de France et 4589 ont été traitées. À Hong-Kong, 4471 demandes ont été acheminées, 4225 ont été examinées.


Sur une période de quatre ans, de 2000 à 2003, le Maghreb a généré plus de 36 000 demandes, contre quelque 13 000 pour la France. Alors qu'il faut entre un et trois mois pour traiter une demande à Paris, le délai est de deux ans pour le nord de l'Afrique. Comment expliquer que trois fois plus de demandes entraînent des délais au mieux 12 fois plus longs avant d'obtenir une entrevue ? "C'est l'effet cascade, ça s'accumule", explique M. Fradette.


Michelle Courchesne


Me Brunet craint d'ailleurs que "l'effet cascade" s'empire au fil des années et que les délais dépassent bientôt sept ans, "au rythme où les demandes arrivent". À ce sujet, la ministre de l'Immigration, Michelle Courchesne, a affirmé le mois dernier en commission parlementaire sa ferme intention d'adresser le problème sans toutefois avancer de proposition concrète.


En point de presse, elle avait tenté une piste de solution, "rapatrier à Montréal une partie des dossiers du Maghreb, qui sont actuellement traités à Paris." Vérification faite, tous les dossiers ont été rapatriés à Montréal en 2001, justement pour augmenter la vitesse de traitement. L'équipe du Service d'immigration du Québec (SIQ) responsable des demandes en provenance de l'Algérie, de la Tunisie et du Maroc est composée d'une douzaine d'employés. Une équipe de 10 employés, basée aussi à Montréal, traite les demandes reçues par le SIQ New York.


Demandes en 1995


En 1995, le Québec avait été confronté à une explosion de demandes d'Algériens fuyant la guerre civile. Le gouvernement avait alors mis en place une équipe spéciale pour pallier le surplus. En un an, 10 000 demandes avaient été traitées, et ce, uniquement pour l'Algérie. À cette époque, les avocats spécialisés en immigration déploraient les délais du gouvernement fédéral, qui, contrairement au Québec, ne fournissait pas à la demande. La situation est aujourd'hui inversée, Ottawa prend en moyenne huit mois pour traiter les demandes provenant du Maghreb.


Pour juguler le flot de demandes de cette région du monde, l'Association des avocats spécialisés en droit de l'immigration propose au gouvernement d'accepter un nombre limite de demandes légèrement supérieur aux objectifs fixés par le gouvernement. Ainsi, pour 2003, Québec comptait accepter 4300 immigrants du Maghreb, contre 7125 de Chine et 7250 de France.


Selon la proposition adressée par Me Brunet en commission parlementaire, les demandeurs dont la requête serait reçue au-delà de la limite établie seraient avisés du non-traitement de leur dossier et invités à se reprendre l'année suivante. Leur chèque ne serait bien sûr pas encaissé.


Mylène Moisan

Le Soleil

Un immigrant reçu se fait facturer 18 675 $ pour l'hospitalisation de sa fille

" Un oubli sans doute. Votre remise immédiate serait appréciée. " Inscrites bien en évidence au milieu de la facture de 18 675 $ envoyée par l'hôpital Sainte-Justine, les deux petites phrases ont fait broyer beaucoup de noir à Hassan Alaoui et à sa femme depuis plus d'un an.

Arrivés au Canada le 29 juin 2003 après avoir été sélectionnés par le service d'immigration du Québec et avoir rempli toutes les formalités exigées, les Alaoui, originaires du Maroc, se doutaient bien que leurs premières semaines de vie à Montréal seraient difficiles. Mais ils étaient loin de s'attendre à ce que le délai de carence imposé par la Régie de l'assurance-maladie, qui prive les immigrants fraîchement arrivés de soins de santé gratuits pendant leurs trois premiers mois au Québec, les mette dans une situation aussi intenable.

L'histoire a commencé un peu moins de deux semaines après l'entrée du couple au pays, lorsque leur fille, Aya, alors âgée de 3 ans, a commencé à se plaindre d'un tenace mal de ventre accompagné de fièvre et d'insomnie. Le 13 juillet, après quelques nuits d'enfer, M. Alaoui, bien conscient qu'il n'était pas couvert par l'assurance-maladie, a fini par se rendre à l'hôpital Sainte-Justine, où les médecins ont rapidement diagnostiqué un abcès abdominal impossible à opérer.

Mise sous étroite surveillance médicale, Aya a dû rester alitée pendant huit jours; à 3735 $ par jour, la facture est rapidement monté à 29 880 $.

Suivant les conseils de membres du personnel médical, M. Alaoui a présenté une demande de prestation de dernier recours (aide sociale) après cinq jours d'hospitalisation, assurant ainsi automatiquement l'admissibilité de la famille au régime d'assurance-maladie; sa facture a ainsi par la suite été réduite à 18 675 $ par l'hôpital Sainte-Justine.

Condamné à l'aide sociale

" Maintenant, le problème, c'est que je suis pris là-dedans. Tant que je reçois de l'aide sociale, les percepteurs de l'hôpital Sainte-Justine ne peuvent absolument rien contre moi, mais dès que je me trouve un boulot, je vais me faire dévorer par eux. "

" C'est ridicule, lance M. Alaoui, âgé de 33 ans et titulaire d'un certificat en électricité. Je suis venu au Canada pour évoluer, pour aller de l'avant dans une carrière qui m'intéresse. Pas pour me faire vivre toute ma vie par la société. "

Mis en place le 31 mai 2001 par l'ex-ministre péquiste Pauline Marois, le délai de carence imposé aux nouveaux immigrants vise principalement à éviter l'utilisation abusive du système par les personnes qui viennent ici " temporairement uniquement pour bénéficier des soins de santé gratuits ". Lors de son implantation, la RAMQ avait également affirmé que, puisque l'Ontario l'impose depuis longtemps, le Québec devait en faire autant pour éviter que des immigrants ontariens prennent une adresse temporaire au Québec pour profiter du système.

" Ce que je trouve ridicule dans tout ça, c'est que j'écope de ce délai de carence alors que j'avais déjà des assurances privées au Maroc qui m'auraient permis de faire soigner gratuitement ma fille, affirme M. Alaoui. Mais en arrivant au Canada, je n'avais tout simplement plus les moyens de me payer de telles assurances parce que je n'avais pas d'emploi. Mon pécule était limité: j'avais à peine de quoi acheter deux matelas neufs et payer deux mois de loyer. "

Philippe Couillard déjà au courant

La Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, qui a à maintes reprises dénoncé ce délai de carence, a soulevé le cas de M. Alaoui devant l'Assemblée nationale en décembre dernier, " mais rien n'a bougé depuis ", affirme son directeur général, Stephan Reichhold. " Le ministre Couillard lui-même m'a dit qu'il était scandalisé par cette affaire et qu'il allait faire quelque chose, mais manifestement rien n'a été fait. "

Selon l'avocat Jean-Pierre Ménard, spécialisé dans les litiges médicaux, le ministre de la Santé jouit d'un pouvoir discrétionnaire qui lui permettrait d'effacer complètement la dette de M. Alaoui " pour motifs humanitaires ".

L'hôpital Sainte-Justine a refusé de commenter le cas de M. Alaoui, se contentant d'affirmer que la facturation est conforme aux normes édictées par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSQ). Le MSSQ a confirmé cette information.

Source : Tristan Péloquin,
La Presse

La réussite des immigrants liée au pays d'origine?

Il y a actuellement à Montréal des immigrants titulaires d’un baccalauréat, d’une maîtrise ou d’un doctorat qui, faute d’un emploi correspondant à leur formation, conduisent des taxis du matin au soir. «Il s’agit d’une réalité qui tend à disparaître», déclare le sociologue Jean Renaud, directeur du Centre d’études ethniques des universités montréalaises (CEETUM). «Sur le plan professionnel, ajoute-t-il, l’intégration se fait de façon plutôt satisfaisante.»

Au cours d’une étude menée auprès de plus de 1541 immigrants de fraîche date (1997-2000), le chercheur a mesuré pour la première fois l’accès aux emplois qualifiés chez les «travailleurs sélectionnés», soit ces immigrants choisis par l’État québécois selon la pertinence de leur savoir-faire sur le marché du travail. «Plus des deux tiers des immigrants (68%) ont un emploi qui correspond à leurs compétences après cinq ans de vie au Québec, résume le chercheur qui a reçu l’aide de Tristan Cayn, cosignataire de cette importante étude. C’est une bonne nouvelle, car il est rare que des immigrants occupent par la suite un emploi de niveau inférieur.»

Autre bonne nouvelle, un immigrant sur deux obtient un premier emploi dans les trois premiers mois de son arrivée, et la même proportion occupe un poste lié à ses compétences dans les 12 premiers mois. Les immigrants titulaires d’un doctorat sont ceux qui ont accès le plus rapidement à un emploi qualifié. Ceux qui éprouvent plus de difficulté à trouver ce type d’emploi sont ceux qui possèdent un diplôme dans le domaine de la santé, des sciences humaines ou des sciences sociales.

Entreprise à la demande du ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles (MICC) du Québec, cette étude est la première en son genre puisque la trajectoire professionnelle des immigrants n’avait jamais été mesurée avec des outils méthodologiques d’une telle précision. Joint par téléphone, chaque répondant (des hommes pour la plupart, car on désirait parler au requérant principal) a dressé la liste de ses différents emplois et des cours d’appoint suivis, décrit son parcours scolaire, etc.

L’échantillon représentatif a été élaboré en fonction des listes du MICC.

Le pays d’origine: facteur de réussite

C’est dans l’analyse des pays d’origine que certaines surprises attendaient les sociologues. Les immigrants en provenance du Maghreb, de l’Europe de l’Est et de l’ex-URSS sont aussi nombreux que les immigrants d’autres origines à dénicher un emploi digne de leurs compétences. Mais leur temps d’adaptation est plus long. «Après une période d’adaptation de 18 mois, ils connaissent le même taux d’accès aux emplois et aux emplois qualifiés que les ressortissants d’Europe de l’Ouest ou des États-Unis», explique M. Renaud.

S’il y a des chauffeurs de taxi diplômés universitaires, c’est surtout parmi les hommes d’origine orientale. «Les immigrants issus d’Asie, du Moyen-Orient et d’Océanie semblent désavantagés. Pour eux, l’accès à un emploi ou à un emploi qualifié est significativement plus lent.»

Même après cinq ans, ces derniers accusent toujours un retard sur le marché du travail quand on les compare avec les autres immigrants. Dans son analyse, M. Renaud se garde de tirer des conclusions définitives sur les causes de cette réalité. «Tout ce que je peux dire, c’est que d’autres études seraient nécessaires pour mieux comprendre ce phénomène», affirme-t-il. Mais il admet que l’effet net des régions de provenance pose problème. Serions-nous en présence d’une forme de discrimination?

Au Québec, les trois plus gros bassins d’immigration sont l’Europe de l’Ouest et les États-Unis avec 37,9% des immigrants, le Maghreb avec 25,6% et l’Europe de l’Est (incluant l’ex-URSS) avec 15,9%. Les régions de l’Asie de l’Ouest et du Moyen-Orient comptent pour 6,2% des nouveaux arrivants, l’Asie de l’Est et l’Océanie pour 5,5%, l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud pour 4,9% et l’Afrique (excluant le Maghreb) pour 4,1%.

Une grille efficace

L’étude dont les résultats ont été rendus publics le 27 mars par le MICC visait à faire la lumière sur le cheminement des immigrants qui correspondent à la catégorie des travailleurs sélectionnés. «Il y a trois principaux groupes d’immigrants, résume M. Renaud: ceux qui viennent rejoindre leur famille, les réfugiés et les travailleurs sélectionnés. Ce sont ces derniers que nous avons suivis.»

Parmi les 40 000 immigrants qui entrent annuellement au Québec avec l’intention d’y faire leur vie, la moitié (22 000 en 2004) sont des travailleurs qualifiés. Ils forment une population largement scolarisée puisque les deux tiers (63%) ont un diplôme universitaire. Plus de 36% ont un diplôme de premier cycle, 15% une maîtrise et 7% un doctorat. Mais ils se heurtent à divers problèmes parmi lesquels figure la reconnaissance des diplômes. Pour de nombreux ordres professionnels, les études accomplies à l’étranger ne constituent pas un critère pour l’entrée dans la profession. Et les besoins du marché du travail fluctuent constamment. Il ne faut donc pas s’étonner que les ingénieurs formés à l’étranger soient en chômage lorsque les firmes d’ingénierie locales licencient leur personnel au complet et ferment boutique.

Ce que le ministère a demandé aux chercheurs, c’est de vérifier si une nouvelle politique de sélection, appliquée en 1996, avait eu un effet positif sur le cheminement des immigrants. La réponse est oui, mais un oui auquel il ne faudrait pas donner trop d’importance, selon le sociologue. «Si l’on compare les deux politiques, avant et après 1996, on peut dire que la seconde est plus efficace, mais seulement de 12 % environ», fait observer M. Renaud.

Source : Canoë & Mathieu-Robert Sauvé, journal Forum de l'Université de Montréal

La vie de Château d'un plongeur immigrant

C'est presque l'histoire typique de l'immigrant instruit qui devient plongeur au Québec, malgré qu'il soit francophone en plus. Mais presque seulement. Parce que celui-là est plongeur au Château Frontenac. Il est syndiqué. Et il gagne le double du salaire minimum, sous l'autorité d'un autre immigrant beaucoup moins anonyme celui-là, le grand chef Jean Soulard.

Ce n'est pas le rêve américain auquel aspirait Brahim Batouil, chez lui au Maroc, dans la ville de Fes ; surtout au bout de 7000 $ de frais d'immigration - il a engagé un conseiller privé, en Afrique. Mais l'homme de 36 ans a gagné en trois ans ce qu'il aurait gagné en 30 là-bas, il a une femme et une petite fille de deux ans, et il coule des jours plutôt heureux dans son quartier de Limoilou. Malgré tout.

"Le plus dur, au Québec, confie Brahim au SOLEIL, c'est l'individualisme des gens. Le chacun pour soi. C'est très difficile d'entrer en contact avec le voisin. Tandis qu'en Afrique, tout le monde parle à tout le monde."

Ce qu'il apprécie le plus, à l'opposé, c'est la grande liberté des individus. "La télé d'ici nous renferme trop sur nous, en parlant surtout de ce qui se passe ici, dit-il. Alors que celle du Maroc nous montre constamment le monde entier. On a même RDI là-bas. Mais elle nous cache le quotidien du pays. Quand on n'est pas informé de ce qui se passe chez soi, on n'est pas libre."

Brahim Batouil voulait d'abord s'installer à Montréal, comme le font 85 % des immigrants du Québec. Mais il avait un précieux contact à Québec, une jeune femme marocaine immigrée avant lui et devenue femme de chambre à l'hôtel Le Concorde. Quand il est arrivé, le 2 avril 2002, la jeune femme l'a hébergé et aidé à se faire une vie à Québec. Elle a si bien réussi qu'ils se sont mariés et ont fait un bébé.

À contrecoeur

Membre d'une modeste famille de six enfants, Brahim a arraché le coeur des siens quand il a décidé de partir. Mais ceux-ci l'ont quand même aidé à émi- grer, parce qu'ils appuyaient ses aspirations à une vie plus facile. Son baccalauréat en bureautique et sa formation d'ingénieur ne l'aidaient pas plus au Maroc qu'ils ne l'aident ici.

"Sauf qu'ici, nuance-t-il, je ne m'attendais pas à ça. La promotion d'Immigration Canada nous dit que de bonnes qualifications vont nous permettre de dénicher un bon emploi. Et quand on arrive au pays, ces qualifications ne sont pas reconnues. Il aurait fallu que je refasse mes études, pour obtenir cette reconnaissance. Je n'avais pas les moyens." Il est néanmoins resté. Contrairement, par exemple, à un ami architecte, qui est retourné au Maroc.

Brahim est content de vivre au Québec. Mais il dit ne pas comprendre que le Canada choisisse l'élite du Maroc, affaiblisse donc ce pays, mais sans trouver le moyen d'en tirer parti lui-même. Une récente étude nationale lui donne fortement raison. Elle démontre que l'instruction acquise à l'étranger ne vaut que les deux tiers de la scolarité complétée au Canada, en termes de revenus, tandis qu'une année d'expérience acquise ailleurs ne vaut que le tiers d'une année d'expérience acquise au Canada.

Il affirme n'avoir rien trouvé de potable au Centre local d'emploi (CLE). Il a donc trouvé des petits boulots par lui-même ici et là : chaîne de production de pizzas congelées, fabrication de gâteaux dans un restaurant. Puis il est allé déposer son curriculum vitae à la Foire annuelle de l'emploi. Le Château Frontenac l'a embauché.

Brahim Batouil a gentiment accepté de raconter son histoire au SOLEIL. Mais il a refusé d'être photographié. Pourquoi ne pas profiter de cette liberté si chère à sa nouvelle vie ?

Source :Alain Bouchard,
Le Soleil

Le tournage d'un film long métrage marocain vient de prendre fin à Montréal.

Le haut de l'affiche du "Toubib", produit par 2M et réalisé par Aziz El Jahidy, est partagé par autant d'acteurs marocains - stars dans leurs pays d'origine, illustres inconnus dans leur pays d'adoption - que d'acteurs québécois.

Le tournage a duré quatre semaines au cours desquelles il fallait jouer parfois à cache-cache avec les averses pour les prises de vues en extérieur.

"Le Toubib" raconte l'histoire d'un médecin venu du Maroc, qui ne peut naturellement pas exercer au Québec malgré ses diplômes, son expérience et sa francophonie. Il ne s'en comporte pas moins avec un civisme exemplaire, ce qui lui vaudra quelques ennuis avec les autorités.

Mais l'essentiel du scénario n'est pas dans cette histoire. Il est bien plus dans l'évolution de la famille, pleinement marocaine par ses traditions mais qui prend aussi dans la société d'accueil, tout ce qui n'est pas en contradiction avec ses valeurs culturelles. Ces emprunts ne se font cependant pas sans quelques grincements de dents, mais toujours de manière désopilante.

On rit en effet beaucoup. On a beaucoup ri sur le plateau déjà. Le film est en ce sens parfaitement servi par une distribution qui compte sur le talent de Khadija Assad et Aziz Saad Allah qu'on ne présente plus, sur Leila El Gouchi (lauréate de Studio 2M 2005), sur Rachid Badouri ( révélation Juste pour rire 2005 et prix du gala des Oliviers de la même année et à ce titre, vedette de l'humour québécois) autant que sur celle qui devrait être la révélation du film Soumaya El Aïdi ou encore Abderrahim Chahid. A ceux-là, une parfaite réplique est donnée par de jeunes futures stars québécoises dont Alexandrine Pilon, Ghislain Tremblay et Julie Anne Coté.

Le film, produit par 2M, est réalisé par Aziz El Jahidy, lauréat (cinéma) de l'Université de Montréal, qui signe là son premier long métrage, après cinq courts métrages et deux documentaires. L'équipe technique est également maroco- québécoise, avec comme première assistante réalisatrice Meftaha Cherrat, directeur photo Michel Saint Martin et ingénieur du son Philippe Mercier.

La première du film sera présentée à l'automne à Montréal. Il sera ensuite distribué en salle au Maroc et au Québec.

MAP

Canada et Maroc, mes deux amours

La communauté des Marocains émigrés au Canada compte 45.000 juifs et 55.000 musulmans. Deux situations différentes, mais un même attachement au pays d’origine.

Manifestation de Marocains contre l’État d’Israël.

Aux Côtes de Neiges, à Montréal, Simone et Rachelle Amar, deux vieilles dames à l’allure occidentale, parées de bijoux en or à la façon d’Essaouira, discutent en parler marocain sous les platanes enneigés du prochain mariage d’une nièce à Casablanca. Comme les sœurs Amar, de nombreuses familles juives marocaines habitent ce quartier de la métropole canadienne.

Amar, Benaroche, Bensoussen, Cohen, El Maleh, Lévy, Malka... en font partie. Elles représentent la première vague des immigrants marocains au Canada. Celle-ci a débuté vers la fin des années quarante pour s’accentuer au milieu des années cinquante. Entre 1957 et 1967, trois mille israélites ont quitté le Maroc pour le Canada. Plusieurs ouvrages consacrés à cette communauté reviennent sur les raisons de cet exode. Tous s’accordent pour dire que ces motivations sont plus politiques qu’économiques.

Le départ des colons français et la montée du panarabisme ont créé une situation d’incertitude. La guerre des Six Jours, en 1967, n’était pas à son tour pour apaiser les esprits. Solly Lévy, l’une des figures de proue de la promotion du dialogue interculturel à Montréal, et son épouse Madeleine sont parmi ceux qui ont laissé leur terre natale pour le Québec à cette époque. Cette province semblait attirer particulièrement les Juifs d’Afrique du Nord, appelés aussi les Sépharades, puisque la majorité de la population y était francophone, comme eux.

À Montréal, l’arrivée des Sépharades a provoqué la naissance de vives tensions entre ces derniers et les immigrants juifs plus anciens, les Ashkénazes. À part une religion commune, ces deux communautés ne partagent pas en effet beaucoup de traits culturels.

Les Ashkénazes sont imprégnés de la culture de l’Europe de l’Est et parlent le yiddish (mélange d’hébreu, d’allemand, de polonais et de russe) tandis que la culture des pays arabes qui les ont vu naître et ses différentes langues et dialectes prédominent chez les Sépharades. Afin de préserver les particularités de leur communauté, ces derniers sont parvenus, non sans difficultés, à mettre en place leurs propres institutions. Ainsi, à Montréal, le réseau des écoles juives est l’un des plus développés d’Amérique du Nord. Ils disposent également de leurs unités hospitalières, de leurs services sociaux et de leurs structures culturelles. «La quinzaine Sépharade» illustre bien leur volonté de faire connaître leur civilisation et leur culture.

La communauté marocaine fêtant aîd el adha 2006 à Montréal.

Plus ouverte que la communauté ashkénaze, la communauté des Juifs marocains s’est intégrée plus facilement à la société québécoise. Possédant une solide éducation, les immigrants juifs marocains occupent des postes importants dans l’enseignement, les professions libérales ainsi que dans les milieux de la mode et du textile. Dans la plupart des cas, ils ont retrouvé une situation financière comparable, sinon meilleure, à celle qu’ils avaient au Maroc. Cette ascension sociale rapide leur a permis de quitter leurs logis de la rue Saint Laurent, quartier juif montréalais, pour habiter des quartiers huppés tels que Côte-Saint-Luc et Dollard-des-Ormeaux.

Bien qu’ils fassent aujourd’hui partie intégrante du paysage canadien, les juifs marocains n’ont pas oublié leur terre natale. Chaque année, comme les autres expatriés israélites du monde entier, ils se retrouvent autour des tombeaux des saints situés à Ouezzane, Essaouira, Errachidia ou Taroudant pour fêter la Haïloula, un moussem juif qui rappelle les fastes du passé et commémore leur relation indéfectible à la terre de leurs ancêtres. Le réalisateur canadien Donald Winkler a immortalisé cet amour en dressant un portrait éloquent de Solly Lévy dans son film Voyage Sépharade... Du Maroc à Montréal. Cet attachement réside aussi dans le rôle qu’ils jouent dans le rayonnement de la culture marocaine. Ils continuent à manger de la dafina, plat traditionnel de la cuisine judéo-marocaine, pendant le shabbat, comme en témoigne Georges Amar, réalisateur à Radio Canada. Sauf que le four à bois a été remplacé par la plaque chauffante, mais le goût est tout aussi savoureux. Au mariage, la cérémonie du henné et le port du caftan sont toujours de rigueur.

Beaucoup de couples juifs reviennent au Maroc pour fêter leur union matrimoniale. Même ceux qui choisissent de la célébrer au Canada veillent à respecter les traditions et les rites liés à la cérémonie de mariage marocaine. Parfois, ils importent tout du Maroc, des tenues et parures en passant par les ingrédients des plats et le mobilier, afin de recréer l’ambiance du pays. Le chanteur Salomon Amzallag, connu par Samy El Maghribi, se produisait régulièrement dans les mariages et autres festivités des juifs marocains au Canada avant sa retraite en Israël. Il a acquis une renommée internationale grâce à ses interprétations de musique hébraïque et arabe.

À côté de cette communauté juive marocaine établie à Montréal et estimée à 45.000 personnes, il y a la communauté des marocains musulmans qui compte, pour sa part, plus de 55.000 ressortissants. Si la première est bien structurée et solidaire, la seconde est par contre dispersée et mal organisée, comme le rapportent plusieurs témoignages.

Le premier immigré marocain musulman s’appelait Mohamed El Morro. Ce marin a débarqué au port de Montréal en 1886. Cependant peu de ses compatriotes ont suivi son exemple. Les flux migratoires n’ont commencé que vers 1980 et n’ont pris de l’ampleur que vers la fin des années quatre-vingt-dix. Entre 2001et 2005, ils étaient 16.428 Marocains à avoir émigré au Canada.

La particularité de cette immigration marocaine par rapport à celle à destination des pays européens, c’est que dans la plupart des cas, celle-ci est légale. Personne ne s’aventurerait à traverser l’Océan Atlantique en patera. De plus, la politique d’immigration, adoptée par le Canada dans les années soixante, est sélective. Elle exige des profils qualifiés exerçant différents métiers: architecture, notariat, expertise comptable, médecine, ingénierie... Ces dernières années, cette liste a beaucoup rétréci.

Le Canada d’aujourd’hui a plus besoin de médecins capables de s’installer dans des provinces éloignées. Peu de Marocains acceptent cette condition. Le Québec, particulièrement Montréal, reste la province la plus privilégiée et la plus prisée.

Ce n’est pas le seul problème que rencontrent les immigrants marocains diplômés. Il y a aussi celui de l’équivalence, une procédure administrative compliquée et lente, mais surtout coûteuse. Une difficulté de taille pour un nouvel arrivant sans revenu. Les statistiques montrent que cela prend en moyenne deux ans et demi pour qu’un Maghrébin trouve son premier emploi au Québec. Le chômage touche 28% des immigrants maghrébins.

Beaucoup de Marocains pratiquent des petits métiers pour survivre. Ils ne prennent pas pour autant la décision de revenir au pays car, souvent, ils n’y ont plus de situation.

Dans ce tableau noir, il existe une lueur d’espoir. Les exemples de success-stories parmi la communauté marocaine ne manquent pas. Mohamed El Khayat est ainsi souvent cité pour son parcours exceptionnel. Ce natif de Tétouan est arrivé à la ville Québec en 1987, muni d’un diplôme en informatique obtenu à Grenade en Espagne et cinq cents dollars en poche. Le jeune El Khayat a ramé pour trouver un emploi de vendeur de produits Apple à Micro-Contact. Aujourd’hui, il est actionnaire à 50% et vice-président directeur général de cette société informatique. Mohamed El Khayat a reçu le titre de “Grand bâtisseur” en 2000, remis par le Bloc Québécois et le prix Immigrant du monde 2001, décerné par la Chambre de commerce et d’industrie du Québec métropolitain.

La diaspora marocaine compte d’autres histoires de réussites, comme celles de Khalil El Koundy, administrateur de systèmes unix à l’agence spatiale canadienne ou Mohamed El Amiri, Directeur du transport aérien à l’Organisation internationale de l’Aviation civile, à Montréal, ou encore Fatima Houda Pépin, député libérale à l’Assemblée générale, pour ne mentionner que ceux-là. Plusieurs associations s’activent pour aider les 100.000 Marocains que compte le Canada à s’adapter à leur nouvel environnement et à s’intégrer socialement, comme c’est le cas pour la Fédération Marocaine du Canada, créée en 1999. Cet organisme à but non lucratif regroupant le mouvement associatif marocain au Canada oeuvre pour les intérêts et l’épanouissement des Marocains à travers l’organisation de manifestations à caractère social, culturel et sportif.

La communauté estudiantine marocaine est également très active. «Pour un Maroc Meilleur», regroupant des étudiants et des résidants marocains au Canada, a organisé le 8 février 2007, une soirée caritative à Montréal pour récolter des fonds et financer de la sorte un programme de lutte contre l’analphabétisme dans les régions les plus reculées du Maroc. Le groupe «Atlasmédias», co-fondé par Rachid Najahi et Abdelghani Dadès, oeuvre pour le rapprochement des Marocains juifs et musulmans établis au Canada avec le pays d’origine en organisant des rencontres intercommunautaires à l’occasion des grandes fêtes religieuses. Mais aussi en relayant l’actualité communautaire par le biais d’une émission radio diffusée tous les dimanches, un site Internet et un bi-mensuel Atlas. Mtl. Actuellement, la communauté marocaine suit avec enthousiasme les élections provinciales québécoises du 27 mars 2007. Et pour cause. Deux candidats d’origine marocaine s’y présentent: Yasmine Alloul, 31 ans, sous les couleurs du Parti Libéral du Québec dans le Comté de Rosemont, et Kamal El Batal, du Parti Québécois, dans la circonscription montréalaise Jeanne-Mance/Viger. Ce jeune Marocain avait soulevé un vif débat sur la discrimination raciale à l’emploi au Québec en 2003. Quoi qu’il en soit, une chose est sûre: les petits-enfants de Simone, Rachelle, Rachid, Yasmine et les autres ne compteront certainement pas pour des prunes dans le Canada de demain.


Par Loubna Bernichi

La ruée vers le Canada

L’émigration vers le Canada connaît actuellement une vigueur sans précédent. De plus en plus de Marocains, issus notamment de la classe moyenne, s’installent dans ce pays de l’Amérique du nord. Le Maroc, semble-t-il, ne suffit plus à leurs ambitions légitimes.



Vivre à l’étranger fait rêver. Fantasmer. Partir pour les Marocains est devenu un leitmotiv, un mot d’ordre, une sorte d’espoir collectif.
Partir, c’est la nouvelle clé de la réussite, une forme de réalisation de soi. Pour réussir sa vie professionnelle et donner la pleine mesure de ses compétences. Jusqu’ici, les candidats au départ se recrutaient parmi les laissés pour compte, cette jeunesse désespérée, sans emploi, sans avenir. “Il n y a rien à faire au Maroc", entend-on dire partout. Un désespoir qui a atteint sa charge dramatique avec les boat people qui, pour gagner l’Espagne clandestinement et trouver un moyen de subsistance, traversent le Détroit au péril de leur vie. Rien à perdre, passer ou crever. Mais la donne a changé.
Il n'y a pas que les émigrés clandestins qui veulent plier bagage. L’envie de s’expatrier empoigne également ceux qui ont une situation professionnelle au pays, des cadres qui gagnent bien leur vie. Cette catégorie sociale veut à son tour s’installer sous d’autres cieux. Le rythme s’accélère. À croire que tout le monde veut émigrer, quitter le navire. Cela renseigne sur le malaise profond qui ronge le pays. Les conversations dans les salons privés glissent souvent sur cette nouvelle forme d’émigration, la fuite des cerveaux et de l’élite. Des noms d’amis sont cités qui ont pris volontairement le chemin de l’exil. Le manque de confiance et l’absence de perspectives d’avenir sont avancés pour justifier cette hémorragie.

Fascination

L’émigration au Canada a pris, au fil des ans, des proportions importantes. C’est la ruée ou presque. Plus qu’un effet de mode, c’est une lame de fond qui traverse la société marocaine. La fascination pour l’Europe n’étant plus ce qu’elle était, les candidats au départ ont changé de direction et regardent désormais de l’autre côté de l’Atlantique.
État fédéral de l’Amérique du Nord, limité au sud par les Etats-Unis, à l’ouest par l’océan pacifique, au nord-ouest par l’Alaska, au nord par l’océan arctique et à l’est par l’océan atlantique, le Canada est un pays très vaste. Un territoire de 9.976139 Km2 où vit une population de 30 millions d’habitants à peine. Malgré la rudesse de son climat, ce pays a toujours attiré des flux migratoires depuis plus de quatre siècles. Cependant, la communauté marocaine est concentrée, francophonie oblige, dans la région du Québec, située au nord-est du continent américain.
Les filières d’émigration au Canada sont multiples. Certains recourent aux cabinets d’avocats moyennant des honoraires se montant à 30.000 Dh environ. Des annonces dans les journaux et sur Internet font florès. Mais ce moyen a des inconvénients. D’abord, le candidat risque d’attendre longtemps avant d’obtenir une réponse qui peut être soit positive, soit négative. Et puis, comme il est juteux, ce créneau a été investi par des escrocs, qui exploitent la détresse des immigrants potentiels. Mais le moyen le plus sûr reste la voie officielle. Déposer un dossier auprès du gouvernement du Québec via l’ambassade du Canada à Rabat. Il ne suffit pas de déposer sa candidature pour qu’elle soit acceptée. Les critères de sélection des candidats sont rigoureux.

Chantier


Le choix se fait en fonction des besoins du pays d’accueil en matière de compétences. Les profils demandés sont des universitaires ou des lauréats des écoles techniques ayant un minimum d’un an d’expérience. Les secteurs privilégiés : les technologies de l’information, l’ingénierie, la finance, les techniques d’entretien… Les compétences dont le Maroc a justement besoin pour se construire et décoller. Jusqu’à quand le Maroc va rester figé à l’état de projet, de grand chantier?

Hassan est auditeur. Naïma informaticienne. Ce couple est en train de plier bagage. Destination: le Canada. Hassan et Naïma ont d’abord inscrit leurs enfants, un garçon et une fille, dans les universités canadiennes. C’est maintenant à leur tour de les rejoindre. Ils se sentent de moins en moins à l’aise chez eux. Et puis, ils pensent qu’ils ont la possibilité de mieux gagner leur vie là-bas.

Des couples comme Naïma et Hassan, il y en a des centaines. Ils ne demandent qu’à partir. Le service de l’immigration croule chaque jour sous une avalanche de demandes d’émigration. En l’an 2000, l’ambassade du Canada à Rabat a émis 2800 visas permanents avec un taux de refus de 12%. La communauté marocaine vivant au Canada est estimée à près de 60 000 personnes. Ce chiffre est appelé à augmenter pendant les années à venir.

Alors pourquoi, ces catégories professionnelles, issues essentiellement de la classe moyenne, prennent-elles le chemin de l’exil ? Lors de l’entretien avec les postulants, on évoque la qualité de l’environnement du travail au Canada et de meilleures chances d’épanouissement que le cadre marocain n’offre pas. En fait, il y a autre chose. Ceux qui veulent s’installer définitivement au Canada ne cherchent pas a priori à faire fortune. Une catégorie de gens convoitent seulement la nationalité canadienne qu’on obtient au bout de 3 ou 4 ans. Pour cela, ils se présentent comme des investisseurs désireux de monter un projet au Canada. Seule condition: déposer l’équivalent de 3 millions de Dh dans une banque canadienne.


Fortune


Cette démarche se fait généralement à Paris. Une fois au Canada, l’investisseur potentiel se voit délivrer des papiers de résident et peut faire des allers-retours entre le pays d’accueil et le pays d’origine en attendant de devenir canadien. Pendant ce temps, si l’argent n’est pas utilisé par son dépositaire pour mettre effectivement sur place son projet, il est fructifié par les autres, injecté dans le circuit économique local. En fait, les autorités canadiennes profitent de cette course vers la nationalité pour obtenir de l’argent frais. Nombre de Marocains, hommes d’affaires fortunés, voire des personnalités politiques, ont recouru à ce procédé qui s’accompagne souvent d’une fuite de capitaux. Prendre une nationalité étrangère rassure et protège à la fois. Un pied ici et un pied là-bas. Un jour… On ne sait jamais… Une espèce de soupape de sécurité. Une espèce d’ombrelle extraterritoriale par rapport à un Maroc habitué jusqu’ici à vivre sous les parapluies. Ces derniers, refermés, ne protègent plus. Les privilégiés d’hier, qui ont tiré profit du système, sont les premiers à le critiquer, à vouloir le fuir. Le Maroc commence à changer. Les privilèges se réduisent, l’impunité est de moins en moins garantie. Forcément, on est inquiet à l’idée d’être un jour inquiété. Quand le pays a besoin d’eux après leur avoir permis de s’enrichir, ils quittent le navire comme des rats. C’est ainsi. L’ingratitude.

Chacun assume son intérêt pour le Canada. Chacun est libre de ses mouvements. Libre d’aller s’installer là où il veut. Ce qui en premier lieu attire la majorité des candidats au départ, ce sont cependant les avantages offerts par ce pays. Des avantages que même les Etats-Unis et certains pays européens n’offrent pas. Il s’agit notamment du confort de vie, de la couverture médicale et du système éducatif en termes de qualité de l’enseignement.
L’enseignement. C’est ce dernier point qui pousse la plupart des couples à choisir le Canada. Se sacrifier pour leurs enfants quitte à supporter les rigueurs du froid et la nostalgie du pays pour qu’ils reçoivent une formation qui leur permette de s’insérer facilement dans la vie active. Des filières aussi pointues que l’agroalimentaire, la pharmaceutique, l’aérospatiale et les technologies de l’information sont disponibles. En somme un circuit universitaire pragmatique et efficace dont les diplômés trouvent facilement de l’embauche. Chose que le système scolaire marocain, ayant du mal à sortir de la crise qui le mine, n’est pas en mesure d’offrir. L’avenir au Maroc fait peur. L’incertitude totale. “À moins d’avoir des moyens pour garantir à sa progéniture des études à l’étranger, on n’est pas rassuré pour le devenir de ses enfants”, explique un candidat au départ. Certes, il fait bon vivre au Canada, on ne s’y ennuie pas. Les loisirs ne manquent pas. Tout est réglé comme du papier à musique. Chacun connaît ses droits et ses obligations. Pas de privilèges. Ni favoritisme, ni népotisme.

Mais le Canada n’est pas un Eldorado où l’argent coule à flots. Le salaire minimum est de 6,90 dollars de l’heure. Mais cela dépend du profil, de l’expérience et du secteur d’activité du candidat. Une chose est sûre : il faut travailler dur pour gagner sa vie. En outre, trouver un emploi n’est pas chose aisée.
Les nouveaux arrivants, à moins de débarquer avec un boulot en poche, ce qui n’est pas le cas de tout le monde, doivent se démener pour dénicher une situation convenable. Il faut surtout connaître les bons tuyaux. Et puis, le chômage n’est pas inexistant. Au Québec, le taux de chômage en 1999 était de 9,1%, alors que dans l'ensemble du Canada il est de 7,2%.


Brassage


Ce ne sont pas ces chiffres qui vont dissuader les candidats au départ. Rien n’arrêtera ceux qui veulent partir. Le Maroc n’a pas su retenir ses enfants. Que faire ? À moins de renverser la vapeur et restaurer la confiance, rien du tout. Certains peuvent toujours arguer que les déplacements des populations sont un phénomène normal, qui a toujours existé et qui existera toujours. D’autres peuvent même renchérir que les flux migratoires, de par le brassage des populations qu’ils entraînent, représentent une certaine richesse culturelle. On se console toujours comme on peut.



Par Abdellah Chankou

La phénomène émigration au Canada s’est converti en phénomène de société

Une patience spartiate est de mise
Le spectaculaire engouement suscité par l’émigration au Canada s’est converti en phénomène de société. Un phénomène qui touche un pourcentage appréciable de jeunes possédant les qualifications requises pour s’établir dans ce pays et disposant de quelques moyens pour faire face à l’onéreuse procédure.

Parallèlement, au fur et à mesure que la demande augmente, les agences d’immigration prolifèrent à un rythme impressionnant aussi bien au Maroc qu’au Canada et les jeunes s’ingénient à mettre tous les atouts de leur côté pour répondre aux critères de sélection.

Mais dans tout ça, qu’en est-il de la procédure ?

Retards de traitement et vérifications à la loupe


Pour les résidents permanents, l’obtention de la carte d’établissement relève du parcours du combattant, les autorités fédérales ayant décidé de resserrer les conditions d’attribution de ce précieux document. Il faut dire à ce titre que les exigences sécuritaires, largement revues à la hausse depuis le 11 septembre 2001, ont changé la donne. Tout passeport fait l’objet d’une enquête méticuleuse auprès des autorités de l’ensemble des pays visités par les candidats. Une norme, certes, en vigueur avant la date des attentats ayant visé New York et Washington, mais depuis, l’enquête sécuritaire ne laisse plus rien au hasard et tout l’itinéraire professionnel ou académique est passé au peigne fin au point que, souvent, les autorités fédérales de l’immigration entrent carrément en contact avec telle ou telle administration, tel ou tel établissement universitaire ou telle ou telle entreprise marocaine ayant délivré l’attestation, pour s’enquérir de la validité des données fournies.


Dans un autre ordre, plus question comme jadis de s’en tenir à de simples attestations d’emploi. Il faut produire un relevé bancaire fournissant les mouvements d’un certain nombre de mois, en plus du relevé de la CNSS.


Autant dire que l’ère des documents falsifiables est sinon révolue, du moins traverse une passe difficile. Assez souvent en prime, les services d’immigration fédéraux canadiens chargés d’étudier le dossier ne bougent pas le petit doigt en attendant le complément d’informations demandé à la partie marocaine, d’où un retard de traitement pouvant se chiffrer en plusieurs mois supplémentaires. C’est ce qui explique que la moyenne de traitement des dossiers se chiffre désormais en 24 mois pour un dossier en failles, contre 18 en moyenne il y a six ans et de douze à quatorze mois il y a une dizaine d’années. Et deux ans, c’est réellement un minimum car des délais de 28 à 30 mois sont de plus en plus fréquents.


Parallèlement à ces retards de traitement, les critères de sélection sont de plus en plus rigoureux. Un baccalauréat, même s’il est suivi d’une expérience professionnelle assez consistante, ne suffit plus aux exigences fixées par Ottawa, surtout si le candidat est âgé au-delà de 35 ans. Les diplômes supérieurs, aussi bien ceux délivrés par les universités ou par les instituts de formation professionnelle (élément constituant un plus dans le marché de l’emploi québécois) eux-mêmes ne valent pas grand chose si une expérience professionnelle n’intervient pas après l’obtention de ces diplômes.


Autant dire que ça se complique singulièrement pour les candidats et c’est ce qui pousse les plus jeunes, c’est à dire ceux qui possèdent à peine un baccalauréat, à user d’un astucieux subterfuge. Ainsi, un jeune de 18 à 20 ans par exemple venant à peine d’avoir son bac, s’il est issu d’un milieu relativement aisé, peut contourner tous ces obstacles à travers une inscription dans une université canadienne. Si le compte du tuteur est bien approvisionné, le futur étudiant au Québec nécessite alors à peine plus de quelques mois pour se rendre au Canada avec un visa d’étudiant accordant un droit de séjour pour la période d’études. Une fois sur place, il entame purement et simplement sa procédure d’immigration qui, dans ce cas, peut prendre plus de cinq ans car la période d’études est retranchée du décompte.


Mais aussi bien pour cette catégorie que pour les candidats à la résidence, le jeu en vaut-il la chandelle ?


Pour répondre à cette question, il faut d’abord et avant tout partir du principe que nulle société n’est parfaite et aucun environnement ne répond entièrement au cadre idyllique que l’on s’imagine dans ses rêves.


Des attraits certains


Dans la rubrique des aspects positifs, force est de reconnaître que les avantages sont nombreux, à commencer par la carte de résident permanent dont l’obtention nécessite non seulement un investissement substantiel, mais également une attente de plus de deux ans. Sans parler des tracasseries de la paperasse interminable. Une fois sur place, on s’aperçoit très rapidement que l’étape canadienne de l’établissement - car il y a également des démarches à faire sur place pour l’obtention de la carte d’assurance maladie et la carte de la sécurité sociale- est grandement facilitée par une administration d’une impressionnante efficacité. Quand on s’engage à vous délivrer tel ou tel document dans telle ou telle date, assez souvent, vous l’obtenez avant. Et en soi, pour tout nouvel arrivant, c’est un heureux apprentissage, surtout pour ceux qui sont habitués au désordre de nos administrations tatillonnes.


On s’aperçoit également sans tarder que le travail ne manque pas. Les offres d’emploi pullulent aussi bien dans les journaux que dans les devantures de magasins. Créer son entreprise peut prendre moins de deux heures, tellement l’encouragement de l’initiative privée est chose palpable même si la réussite n’est pas toujours au rendez-vous. Et si ça ne marche pas, vous aurez droit à une seconde chance et il y a même des centres communautaires qui pourraient vous aider dans vos démarches en plus de vous fournir quelques tuyaux précieux. Au niveau de la scolarité des enfants, on a l’assurance qu’un diplôme canadien n’a plus grand chose à envier aujourd’hui à l’américain. HEC Montréal, Mc Gill ou l’UQÀM ouvrent leurs portes aux étudiants du monde entier et les Marocains ne sont pas en reste. Et on ne compte plus le nombre d’étudiants français venus étudier chez leurs cousins de la Nouvelle France en jurant à qui veut les entendre que la différence en terme de qualité d’enseignement est notable.


Pour pratiquer du sport, les centres de quartier sont ouverts gratuitement et sont parfaitement équipés. Pour sortir, chaque saison offre toute une gamme d’activités, du ski à la musique en plein air, en passant par une randonnée en kayak... Et pour arroser le tout, le Québec demeure beaucoup plus abordable que l’Europe aussi bien pour ce qui est du logement qu’en ce qui concerne le carburant et la restauration hors de chez soi...


Pour autant, tout n’est pas parfait, loin delà.


Les lacunes


Si les attraits sont effectivement incalculables, il y a lieu d’adresser une petite mise en garde à l’adresse ce ceux qui ne sont pas familiarisés avec la mentalité nord-américaine. Ceux qui viennent de fouler le sol canadien doivent se mettre à l’esprit qu’ils en ont pour toute une période d’adaptation. Au Maroc, quelqu’un qui se sait qualifié ne va pas accepter n’importe quel petit boulot. Question d’amour propre. Au Canada, n’importe qui peut livrer une pizza, empiler des cartons dans une usine, travailler comme préposé au nettoyage... et rebondir en un temps record pour devenir propriétaire d’une pizzeria ou gérant dans une usine. Il s’agit donc de commencer au bas de l’échelle en oubliant complètement son passé marocain en apprenant à exécuter des tâches que l’on ne pensait pas faites pour soi. Le manque d’expérience canadienne est à ce titre un handicap terrible qui ne peut être compensé que par un long et douloureux apprentissage sur le terrain. À moins de se recycler en regagnant le banc de l’université, le temps de décrocher un diplôme susceptible de vous permettre d’accéder au marché canadien. Ce n’est que dans ce cas que votre expérience marocaine recouvre alors un sens.


Au niveau de l’éducation des enfants, c’est une arme à double tranchant. Autant ils ont toutes les possibilités de s’épanouir grâce à un système taillé sur mesure pour eux, autant les parents issus d’un milieu comme le marocain peuvent perdre à un certain moment tout contrôle sur leur progéniture.
Allonger une bonne baffe à votre rejeton peut vous coûter très cher. Des traces de « correction » peuvent vous valoir une dénonciation de la part de l’établissement scolaire de votre enfant. Et en cas de récidive, on saisit les services sociaux qui peuvent aller jusqu’à vous retirer la garde de votre fils. Et à ce titre, les exemples sont très nombreux. Allez donc avec ça expliquer à une assistante sociale qu’une bonne paire de claques fait partie des « trabi » qui s’héritent en quelque sorte de père en fils dans notre façon d’éduquer.


Dans un autre contexte, les attaques du 11 septembre 2001 ont fait que les Arabes ne soient pas particulièrement recherchés dans le marché de l’emploi, notamment pour ce qui est des postes de responsabilité. Quant aux femmes, le hijab constitue d’emblée un handicap dans une première entrevue.


Cependant, la discrimination est loin d’atteindre les proportions constatées en Europe.


Pour ceux qui, malgré tout, sont parvenus à se frayer une place enviable dans le marché du travail, les prélèvements fiscaux peuvent être tels que bon nombre de cadres marocains se sont retrouvés en fin de compte avec des salaires dépassant à peine ce qu’ils touchaient au Maroc. Voilà qui donne à réfléchir.


Dans les marchés d’alimentation, si tout est disponible, acquérir les spécialités de chez nous peut vous coûter jusqu’à cinq fois plus cher et même avec ça, les Marocains ne peuvent s’empêcher de traverser tout Montréal pour s’acheter de la menthe au marché Jean Talon. A ce titre, passer le Ramadan si loin est une épreuve tout à fait pénible.


Et on peut également citer un certain nombre d’aspects qui rendent compliqués les premiers mois de séjour comme le froid glacial ou les relations empreintes de calculs entre les individus.


Dans tous les cas de figure, émigrer est une décision trop grave pour ne pas en cerner tous les aspects aussi bien pour son propre bien-être que pour celui de sa progéniture. Les avantages découlant de cette décision sont certes indéniables, mais la réussite du projet est inhérente à une conjugaison de facteurs au sommet desquels figure le degré de prise de conscience par la famille quant à l’importance du pas à franchir. Il serait cruel de déchanter après avoir tant investi en temps et en argent, sans parler de la déchirure qu’implique le fait de quitter les siens.




L'opinion


samedi 23 juin 2007

Le Canada attire les candidats à l'exil d'origine maghrébine

Année après année, le Canada fait figure de destination privilégiée pour les candidats maghrébins à l'exil, et le Maroc est le premier pourvoyeur de migrants pour le pays de l'érable", rapporte Le Quotidien d'Oran. En effet, selon les chiffres publiés par l'ambassade du Canada en France pour la période qui va de 1998 à 2004, 17 517 Marocains ont obtenu un visa de résident permanent. Le Maroc est suivi de près par l'Algérie, avec 15 840 migrants. Arrivent ensuite loin derrière la Tunisie, avec 2 633 résidents permanents, et la Libye (1 520).

"Ces chiffres confirment bien que l'immigration maghrébine au Canada est une affaire algéro-marocaine", souligne le quotidien. Pour ces migrants, Canada rime surtout avec Québec, où 90 % des demandes de visa sont déposées. Ce choix de la Belle Province n'est pas dû au hasard, mais au fait que le français y est pratiqué.

Et ce mouvement de population devrait s'accroître dans la mesure où le Canada, qui en 2005 avait prévu d'accueillir entre 220 000 et 245 000 nouveaux résidents permanents, s'est fixé le même objectif pour 2006. "Le Canada a besoin des talents des immigrants et du dynamisme qu'ils apportent au pays. Pour bâtir son avenir et garantir sa prospérité économique, il doit accueillir un nombre accru d'immigrants", estime le rapport annuel au Parlement canadien sur l'immigration, cité par le quotidien.

La sélection des nouveaux résidents économiques est fondée sur un système de points. Le niveau d'études équivaut à 25 points et la connaissance du français et de l'anglais à 24 points. Viennent ensuite l'expérience professionnelle, 21 points, l'âge, 10 points, l'existence d'un emploi réservé au Canada, 10 points, et la capacité d'adaptation, 10 points également. Le candidat à l'exil doit obtenir un minimum de 67 points pour obtenir son visa.


Ce système de sélection semble bien rodé et pourtant, fin 2004, on a dénombré pas moins de 700 000 dossiers restés en souffrance. Pour résoudre les difficultés rencontrées dans la gestion des demandes, Ottawa prépare la mise en place d'un système informatique unique, baptisé Système mondial de gestion des cas (SMGC).


Source : infosdumaroc.com

Marchands de rêve

Certains postulants marocains à l’immigration au Québec s’adressent à une boutique intermédiaire comme s’ils se confiaient à une cartomancière, au lieu de passer par la procédure diplomatique régulière.

Le Canada est la nouvelle frontière de tous les fantasmes migratoires. Le Maroc y occupe une bonne place et même plus qu’il n’en faut, au goût des autorités de ce vaste pays de l’extrême nord. Pour coller au sujet qui nous préoccupe, on devrait parler du Québec, plutôt que du Canada aux dix provinces et deux territoires.

Car c’est au Québec, une province au statut particulier, sept fois la France pour sept millions d’habitants, que se concentrent près de 90% des immigrants marocains. On peut dire, dans l’absolu, qu’il y a donc de l’espace pour des étendues à faible densité et à forte demande d’immigrants.

Sauf que l’équation espace-peuplement ne se pose pas uniquement en termes quantitatifs. Il y va aussi du profil des migrants et de l’équilibre ethnique et culturel dans une société originellement et foncièrement diversifiée. Cette diversité, que le gouvernement autonome du Québec veut, à tout prix, maintenir et entretenir, est précisément jugée menacée par un déséquilibre migratoire.

Arnaque


Le Maghreb en général et le Maroc en particulier y sont pour quelque chose. Un chiffre, à titre d’ordre de grandeur : sur la base de 37000 dossiers de demandes d’immigration planifiées, pour les quatre coins du monde, 19000 sont de provenance maghrébine, avec une écrasante majorité au compte des Marocains.
L’immigration clandestine sur des pateras de pacotille, à travers le Détroit de Gibraltar et à l’issue souvent dramatique, ressemble à un « sauve qui peut du Maroc», proprement calamiteux. Le grand départ vers le Canada est tout autre, pour cause d’Océan autrement plus difficilement franchissable par d’éventuels boat people qu’une « mer intérieure » comme la Méditerranée. Il se trouve que des officines intermédiaires font un mélange des genres, sous forme d’arnaque financière, en faisant de fausses promesses, au prix fort, à des candidats à l’immigration au Canada.
Ce qui a généré des dizaines de milliers de demandes dont la plupart sont en porte-à-faux par rapport aux critères de sélection du pays d’accueil.

De plus, ces vendeurs de rêves occasionnent aux services administratifs du Québec, un surplus de travail pour le tri des dossiers et l’obligation de réponse aux postulants. C’est précisément l’objectif de la visite au Maroc de Alcindor Maryse, sous ministre adjointe à l’immigration, depuis le mercredi 13 octobre 2004.


Pluri-culturalité


Les messages qu’elle compte faire passer sont simples. Un. L’interférence des intermédiaires en immigration vers le Québec constitue une sorte de commerce lucratif qui tirent avantage de la vulnérabilité de certaines catégories sociales.
Deux. Cette intermédiation n’est d’aucune utilité, puisque la personne candidate doit nécessairement répondre aux exigences nécessaires pour être sélectionnée et qu’il suffit pour cela de passer par le circuit officiel des services d’immigration-Québec. Trois. La planification des niveaux d’immigration du Québec ne saurait être dictée par les intérêts d’affaires de mercantiles locaux.
L’émissaire attitré du gouvernement québécois se défend de toute idée de fermeture de la province à une immigration spécifique. «La population québécoise, dit-elle, est formée d’une centaine de communautés de langues, de cultures et de religions diverses, qui contribuent à l’enrichissement social, économique et culturel du Québec». Ce qui constitue le socle d’une communauté qui entend maîtriser sa pluri-culturalité.

C’est son droit. Et elle s’en est donné les moyens par une nouvelle loi, adoptée en juin 2004, pour réguler les flux migratoires « par bassins géographiques lorsque jugés nécessaires ». Sur cette réglementation récente, madame la ministre avance l’argument de « l’égalité d’accessibilité au Québec». Elle s’en explique dans l’interview expresse, qu’elle nous a accordée (voir page 27).

Peut-on en vouloir aux autorités québécoises de décider souverainement du profil et du volume d’immigrants qu’ils souhaitent recevoir ? Évidemment que non ! Il n’est donc pas question que l’on se cache derrière la liberté totale et totalement libre de déplacement des personnes. Les Québécois ont établi des règles en utilisant à bon escient l’outil internet à travers un site d’une extrême lisibilité pédagogique.

Il est possible, dans n’importe quel cybercafé du coin, non seulement de se renseigner sur les conditions d’immigration requises, mais aussi de s’auto-évaluer sur les pré-requis exigés. On pourra, évidemment, objecter que le message internet s’adresse à une société à moitié analphabète où l’accès aux nouvelles technologies ressemble encore à la conquête de la lune. Objection rejetée, parce que, en plus des étudiants, les candidats marocains à l’immigration, non pas provisoire mais durable, au Québec, appartiennent à des catégories sociales lettrées, souvent diplômées et même parfois professionnellement intégrées. Ces postulants-là, précisément, au lieu de s’informer par internet et de passer par la procédure diplomatique régulière, s’adressent à une boutique intermédiaire comme s’ils se confiaient à une cartomancière.


Sollicitation


L’appel migratoire du Québec est donc maintenu. Mais la demande se veut, désormais, plus exigeante en matière de savoir-faire et d’expérience professionnelle. Précisément et fort heureusement, le profil des immigrants marocains n’est pas loin de ces conditions d’accès. Sept sur dix ont une scolarité post-scolaire. Ils sont au total quelque cent mille, se plaçant ainsi au troisième rang des catégories communautaires. Les étudiants marocains, au nombre d’un millier, font, eux, l’objet de sollicitation d’installation.

Du moins pour ceux dont la spécialisation et le choix professionnel correspondent aux possibilités réelles d’emplois. Il n’y a donc pas de grand décalage entre le type d’immigrants marocains et la grille de sélection québécoise. Il faut juste que la démarche à l’amont, ici-même, s’inscrive dans une procédure officielle et régulière. Avouez que ce n’est pas trop demandé.



Par Abdellatif Mansour

L’immigration de Marocains au Canada s’intensifie: LA RECHERCHE DU PARADIS

Les Marocains rêvent d’aller au Canada. Une immigration temporaire ou définitive. Le voyage au delà de l’Atlantique est devenu une fixation pour certains diplômés de chez nous. Et pourtant, le Canada ce n’est pas le paradis que l’on croit. Cela peut se transformer en cauchemar.

Chacun se débrouille comme il peut pour immigrer là où il peut.

Said est un iconoclaste. Après quelques années au Canada, il décide de retourner au bercail. Il fait partie des rares, très rares marocains qui font le chemin inverse. Avec une fortune plus que modeste, il a pourtant repris l’avion en sens inverse. " Question de feeling et ceux qui croient qu’il est facile de s’installer au Canada n’ont qu’à tenter l’expérience ! " explique-t-il. Pour lui, le Canada est un très beau pays mais ce n’est pas le paradis.
Une opinion qu’il ne trouvera pas beaucoup de Marocains à partager. Car pour bon nombre de nationaux, le Canada en général et le Québec en particulier représentent bien le paradis sur terre. En témoigne la ruée des Marocains sur les services d’immigration de l’ambassade du Canada et l’afflux que connaît le bureau de Paris chargé de la question pour l’Afrique du nord. Le Canada reçoit chaque année plus de 200 000 immigrants qui ont choisi de s’expatrier.


Réglementation


Si dans le lot, les Marocains sont de plus en plus nombreux, il faut reconnaître que l’immigration canadienne est strictement réglementée ; les canadiens ne donnant accès à leur marché de travail qu’à des profils qui correspondent aux besoins locaux. A tel point que régulièrement les services d’immigration mettent à jour les listes des professions " inadmissibles " selon la formule consacrée.
Médecins s’abstenir, jusqu’à présent ces derniers sont indésirables au Québec. On nous annonce que depuis mai 2000, la liste des professions inadmissibles qui contenait nombre d’architectes, avocats, enseignants, experts comptables et autres vétérinaires a été supprimée sauf dans le cas des médecins. Il y a deux types d’immigrations, une immigration temporaire et l’immigration définitive.
Dans le premier cas, le statut temporaire qui doit être renouvelé chaque année nécessite un contrat de travail préliminaire qui donne le droit de déclencher les démarches. Avant de donner son feu vert, l’administration canadienne doit s’assurer qu’aucun Canadien n’est susceptible de postuler à l’emploi demandé.
Pour ce qui est de l’installation définitive, elle est réservée à ceux qui ont beaucoup de patience et des ressources financières confortables. En effet, les études coûtent extrêmement cher et pour ce qui est des autres formules, la sélection est tellement serrée que la réponse peut prendre des années avant d’être positive.
Les postulants sont triés sur le volet grâce à une série d’enquêtes et de questionnaires qui font entrer en jeu les diplômes, l’âge, la profession, la situation familiale et même la personnalité. En plus à part l'âge, le pointage attribué aux facteurs et critères de sélection fait l'objet d'une réévaluation à chacune des étapes réglementaires de la procédure de traitement d'une demande.
En clair en cas de changement de situation personnelle ou de modification des listes des professions en demande, des formations privilégiées et des professions inadmissibles, le pointage est révisé en conséquence et la demande pourrait être rejetée en raison de ces changements.


Privilège


En outre même dans le cas d’une réponse positive, les candidats à l’immigration doivent justifier de ressources financières suffisantes qui leur permettent de vivre au Canada avant de trouver un emploi.
Car ni le gouvernement du Canada, ni ses services d'immigration ne proposent d'emplois aux candidats.
Tout ce parcours du combattant n’empêche guère le commun des Marocains de rêver à une retraite dorée au bord du lac Saint-Laurent.

Parce que le Québec reste une destination privilégiée pour les marocains en raison du facteur linguistiques La population du Québec continue de croître d'environ 0,5 % par année et près de la moitié de cet accroissement est dû à l'immigration internationale.


Recours


De 1991 à 1996, 135.000 immigrants se sont établis dans la seule région de Montréal. La population immigrée du Québec est de 665.000 personnes, soit plus d'un Québécois sur dix. L'immigration représente trois enjeux: un enjeu démographique, un enjeu économique et un enjeu linguistique. A tel point que les cabinets conseil en immigration ont fleuri aux quatre coins du pays. Pour vendre aux candidats à l’immigration du vent.
En effet " les réponses garanties" et autres études de dossier dans les meilleurs délais ne représentent rien du tout au niveau de la législation canadienne. En réponse aux nombreuses escroqueries dont sont victimes régulièrement les candidats au voyage, les services d’immigration du Québec ont mis en garde contre le recours aux services des intermédiaires en immigration précisant qu’Il " appartient à chaque requérant de décider de l'opportunité de recourir aux services d'un intermédiaire pour l'aider dans ses démarches. Le ministère tient cependant à informer qu'il traite de la même façon tous les dossiers de candidature qui lui sont soumis. Aucun traitement prioritaire ou particulier n'est accordé à un candidat qui retient les services d'un intermédiaire en immigration ".

Intérêt

Cela dit, la communauté marocaine au Canada est très dynamique. La Fédération marocaine du Canada (FMC) vient d’ailleurs de tenir, dimanche dernier à Montréal, sa première assemblée générale. La FMC, constituée en mai 1999, regroupe aussi bien des associations que des membres individuels a pour objectif de servir les intérêts marocains auprès des autorités canadiennes.

Elle regroupe en son sein sept associations, l’Alliance maroco-canadienne d’Ottawa (AMC), l’Association
musulmane de Montréal-Nord (AMMN), l’Association marocaine du Québec (AMQ), le Raja sport de Montréal, l’Association des biologistes marocains au Canada, l’Association des familles marocaines du Canada (AFMC), et le Comité des marocains du Québec (CMQ).
En matière d'immigration et d'intégration , les marocains semblent avoir fait leurs preuves. Ce qui a fait dire à un ministre québécois de passage au Maroc qu’il fallait trouver " une formule pour compenser la perte au Maroc de cette population de qualité"

Par Abdellatif EL AZIZI

La visite médicale

Avant de venir au Canada, vous devez passer un examen médical. Les personnes à votre charge doivent également en passer un, même si elles ne vous accompagnent pas.
Une demande de résidence permanente ne sera pas acceptée si l’état de santé du demandeur :
  • présente un risque pour la santé ou la sécurité publiques; ou
  • risque d’entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé au Canada.
Instructions concernant l’examen médical

Normalement, des instructions sur la marche à suivre pour passer l’examen médical vous seront envoyées lorsque vous aurez présenté votre demande au bureau des visas.


Validité


Vous ne pouvez utiliser les résultats de votre examen médical dans votre demande que pendant les 12 mois suivant la date de l’examen. Si vous n’êtes pas admis au Canada à titre de résident permanent dans ce délai, vous devrez passer un autre examen médical.


Médecins autorisés


Votre médecin ne peut effectuer l’examen médical. Vous devez consulter un médecin figurant sur la liste des médecins désignés (MD).


Formalités liées au rapport médical


Les rapports médicaux et les radiographies passées pour les besoins de l’examen médical deviennent la propriété des autorités médicales d’Immigration Canada et ne peuvent vous être retournés.
Le médecin ne vous fournira pas les résultats de l’examen. Il vous indiquera toutefois si vous avez un problème de santé.

Le MD
ne prend pas la décision définitive. C’est Citoyenneté et Immigration Canada qui décide de façon définitive si vous avez satisfait à l’examen médical à des fins d’immigration.
Le bureau des visas vous indiquera par écrit si les résultats de votre examen médical posent un problème.